Mobilisation agricole: les appels à la "trêve de Noël" se multiplient
Les appels à une "trêve de Noël" se multiplient après l'annonce du report de l'accord UE-Mercosur mais la colère des agriculteurs persiste sur le terrain face à la gestion de la dermatose bovine par le gouvernement, dont le chef Sébastien Lecornu reçoit vendredi matin les syndicats agricoles.
Le gouvernement "ne tolérera plus de nouveaux blocages" des agriculteurs pendant les fêtes de Noël, même si les forces de l'ordre agiront "avec discernement", a prévenu la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon sur RTL.
Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a dit sur Franceinfo souhaiter une "trêve" des blocages et manifestations d'agriculteurs pour Noël, à condition que le rendez-vous avec le Premier ministre prévu dans la matinée apporte des "réponses".
L'enjeu sera de voir si cet appel tient sur le terrain puisque la FNSEA n'est pas à la barre des principaux blocages dans le Sud-Ouest et que les organisations syndicales sur les barrages routiers ont appelé au maintien de la mobilisation.
Coordination rurale (CR) et Confédération paysanne ont amplifié leurs blocages ces derniers jours, la colère ayant été ravivée par la gestion de l'épizootie de dermatose nodulaire contagieuse (DNC). Ces deux syndicats ont été rejoints localement par des Jeunes agriculteurs (JA) et parfois des adhérents de la FNSEA.
"Puisqu'on nous demande de faire la trêve pour les manifestations par rapport aux fêtes de fin d'année, on attend une trêve de l'abattage complet des troupeaux", a déclaré sur Ici Occitanie Lionel Candelon, président de la chambre d'agriculture du Gers issu de la CR, depuis un blocage de l'A64 près de Carbonne.
Il répondait à la ministre Annie Genevard, aussi interrogée sur l'antenne locale, qui a éludé la question de l'abattage systématique en cas de détection d'un cas de dermatose en renvoyant à la cellule de dialogue scientifique mise en place pour étudier des protocoles alternatifs.
"La première réunion s'est extrêmement bien passée, les éleveurs ont posé des questions précises, les experts ont dit vouloir y répondre précisément, je les laisse en débattre puisque cette question est éminemment éruptive", a-t-elle déclaré.
- Empêcher les nouveaux blocages -
"On ne veut pas opposer les policiers, les gendarmes et les agriculteurs. Mais pour autant, les Français doivent pouvoir rejoindre leur famille pour ces moments de fête, c'est aussi notre responsabilité", a prévenu Maud Brégeon, à l'approche du dernier week-end avant Noël. L'entourage du ministre de l’Intérieur Laurent Nunez a précisé à l'AFP que cette volonté d'éviter tout nouveau blocage était en place depuis 48 heures.
Le Premier ministre Sébastien Lecornu reçoit vendredi matin à Matignon les représentants des quatre principales organisations agricoles.
La fronde se matérialise par des dépôts de pneus, paille, palettes, fumier et déchets plastiques sur les autoroutes ou devant des bâtiments de l'État, ainsi que par le blocage de certaines routes secondaires.
Jeudi, le ministère de l'Intérieur dénombrait 110 actions en cours mobilisant 5.000 personnes, contre 80 actions mercredi, 75 mardi, 45 lundi et 27 dimanche.
Les principaux blocages du Sud-Ouest étaient encore en cours vendredi matin.
Entre 60 et 70 tracteurs de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA) du Vaucluse ont déversé des déchets plastiques devant la préfecture, dénonçant un recyclage "de plus en plus cher" pour la profession.
- Mercosur, du Touquet à Bruxelles -
Au Touquet (Pas-de-Calais), quelques dizaines de manifestants accompagnés de tracteurs se sont rassemblés devant la villa d’Emmanuel Macron, à l'appel de la FDSEA.
Le mouvement se veut "symbolique", explique Benoît Hédin, vice-président de la FDSEA de Montreuil-sur-Mer. "Il vise la politique européenne menée aujourd’hui, car nous sommes en train de refaire marche arrière. Nous manifestons contre l'accord Mercosur, la baisse de la PAC, la taxe sur les engrais, la concurrence déloyale."
Jeudi, quelque 10.000 agriculteurs européens, dont un gros contingent venu du nord de la France en tracteur, essentiellement membres des Jeunes Agriculteurs et de la FNSEA, ont manifesté à Bruxelles contre la signature de l'accord entre l'UE et des pays du Mercosur.
Négocié depuis plus de 25 ans, ce traité de libre-échange permettrait à l'UE d'exporter davantage de véhicules, machines, vins et spiritueux dans ces quatre pays. Dans le même temps, il faciliterait l'entrée en Europe de viande, sucre, riz, miel et soja sud-américains, ce qui alarme les filières concernées.
La Commission semblait déterminée à arracher d'ici vendredi un feu vert des Vingt-Sept mais le soutien de l'Italie à la France, opposée à la signature, a finalement conduit jeudi soir la présidente de la commission Ursula von der Leyen à le reporter à janvier.
La FNSEA a toutefois estimé que ce n'était "pas suffisant", appelant ses adhérents à rester "mobilisés", faisant craindre un troisième hiver de mobilisation agricole.
bur-im-llb-mdz/abb/de
(R.Mohlala--TPT)